Par Jérôme Bobin

(Photos Pierre Rondel)

Introduction

IMG_005015 Août 2002, site de notre dame des neiges près de Briançon, le beau temps est de la partie, le vent aussi. Quelques foulées nous séparent du 1er vol, trim au neutre, débattements ajustés, centrage vérifié. Devant nous: 800 mètres de dénivelé, derrière nous : 18 mois de construction et des centaines d’heures de cogitation. Mais avant de connaître l’issue de ce vol, voyons comment en sommes-nous arrivé là.

Genèse

Depuis maintenant quelques années, des planeurs aux formes étranges envahissent le ciel. Surface latérale importante, gouvernes surdimensionnées, débattements « prononcés ».Tout un tas d’ingrédients pour éviter de rester a plat…

L’idée de réaliser le Toons tiens de l’existence d’un tel planeur : le voltij.

En effet, pour tout ceux qui ont eut la chance d’essayer ce planeur, il est fort probable que leur vision de la voltige fut chamboulée. Le seul défaut de ce planeur (mais qui a vrai dire est aussi l’un de ses avantages!) est sa taille, et l’on ce prend vite a rêver de vol tranche en taille XXL. Pour ma part mes rêves s’arrêtèrent à ce stade jusqu’au jour où je fis part de mes intentions à Benjamin Clamaron. Mes paroles furent de trop… L’aventure pouvait commencer !

Cahier des charges

Avant tout revenons au voltij. Ce planeur reste pour moi LA référence en terme de 3D (pub sincère et gratuite!!), niveau cabriole il sait quasiment tout faire: du vol d’accro dans le petit temps à la pente, à la voltige académique en plaine, rien ne lui faire peur. Et c’est sa faculté à tournicoter dans le petit temps qui nous a beaucoup intéressé. Pour rester maniable dans le petit temps, la recette parait assez évidente. L’élément le plus important est la voilure.

La construction

Le master

IMG_00951er avril 2001, Les premiers miaulements se firent entendre, la scie sauteuse attaquait férocement les planches de medium du master. Six planches furent utilisées pour obtenir la bonne épaisseur du fuso (a noté qu’il est fort utile de choisir un nombre pair de planche afin d’avoir un axe de symétrie). Au bout de quelques jours on obtient une belle bûche, et on est bien content de voir que le master prend forme… sauf que c’est juste le début des ennuis.

3 mois et des poussières plus tard (euh beaucoup de poussières plus tard), le master a pris forme, les galbes sont là et le moment de l’implantation de la dérive arrive, là aussi nous n’avons rien inventé, la dérive a été découpé au fil chaud, coffré, poncé, puis collé sur le master (c’est si facile à écrire…). Ensuite il faut retirer le volet de dérive qui sera terminé plus tard. Le gros œuvre étant terminé, il faut passer les premières couches d’apprêt synonyme lui aussi de ponçage (Ah !! le vilain). Une foi l’apprêt passé (et poncé) vient le tour de la peinture (automobile deux composants pour nous). Après plusieurs couches, une bonne séance de ponçage/lustrage s’impose. Après cela, et normalement ça vous a pris un bon bout de temps, il ne manque plus qu’a finir le master du volet de dérive, qui suivra lui aussi les mêmes traitements que le fuso. Voilà pour le master, mais pour ceux qui aiment bien les chiffres le master pèse la bagatelle de 40 Kg… Et il a nécessité environs 8 mois de travail.

Le moule

Le premier moule réalisé fut celui de la verrière, car le master a été redécoupé par la suite afin de réaliser la feuillure de cette dernière. Pour le reste je ne m’étendrais pas beaucoup sur ce sujet car de nombreux articles existent. Le moule est intégralement réalisé en résine époxy. De même pour celui de la dérive. Je voudrais préciser que la plasturgie n’est pas réservée qu’à une élite, avec un zeste de conseil, un peu de lecture et un brin de discussion auprès de gens compétents, on réalise des choses assez sympa ( bon il y a quand même des tours de mains a acquérir). Bref pour notre première expérience dans ce domaine, on s’en est pas mal tiré (nous avons quand même fait quelques bêtises). Et c’est le 1er avril 2002 que fut ouvert le moule, et oui 1 an…

Les fuselages 

Quel plaisir d’avoir son propre moule. Mais reste qu’il faut quand même réaliser les pièces destinées au vol. Et zou, re-résine, à titre indicatif, un fuselage est composé de :

En s’appliquant un peu on obtient une pièce fort solide d’1.8 kg.

Les ailes 

Si un jour vous réalisez des ailes d’1.5m² ayant une corde de 50cm retenez une chose : il n’y a pas besoins d’imposants longerons. Je m’explique, avec 50cm de corde, on obtient une bonne épaisseur.

Par conséquent, les noyaux sont déjà bien solide, à propos des noyaux je conseille d’utiliser un polystyrène le plus léger possible quitte à avoir des billes d’un bon diamètre, pour le longeron un bout de 50cm de CTP 4mm ou mieux d’un sandwich carbone/balsa/carbone/balsa/carbone suffiront amplement. Le coffrage est à base de samba 10/10 (cette épaisseur permet un bon travail de ponçage en gommant les imperfections de coffrage). Etant peu habitué à ce gabarit d’aile, nous nous sommes un petit peu « planté » lors de la réalisation de la première aile. Comme très souvent dans le modélisme, nous surdimensionnont terriblement les différents éléments (longerons, clef d’aile…) et c’est ainsi que l’on obtient un planeur béton… mais aussi béton par son poids ! Le tir fut très rapidement corrigé avec la deuxième paire d’aile, le styro fut remplacé par du polystyrène moyennement dense, les longerons en CTP 4mm furent échangés pour des longeronnnets en carbone et balsa, le nombres de cravates en fibres fut nettement réduit. Le gain de ses modifications fut d’1.6kg. Les nouvelles ailes ne plient absolument pas, ce qui nous laisse penser que les prochaines maigriront encore. Une clef d’aile en carbone (18 cm de diamètre) est utilisée, le prix est certes élevé mais nous n’avons rien trouvé de mieux.

Les différentes gouvernes sont articulées à l’aide de tissus d’arrachage, intégré dès la construction des ailes. A cause de la grande profondeur des gouvernes il est nécessaire de renforcer le coffrage au niveau de l’articulation car ce dernier a tendance à ce casser.

Comme expliqué précédemment, le Toons est équipé de trois ailerons par aile ce qui représente des gouvernes d’environs 60cm, par conséquent nous avons jugé inutile de les caissonner (au niveau de l’articulation, les gouvernes sont encore très épaisses) .

Installation radio

 

IMG_0104Notre planeur dispose de 9 gouvernes… il nous faudra donc un minimum de 9 servos, Cartésien non ? Pour les 6 ailerons, pas de problème, chacun le sien ! Par contre quand on regarde la taille de la dérive, des questions me parviennent : quel est le servo capable d’actionner convenablement une telle gouverne ? Et quel va être son prix ? De tel servo existe, mais ils sont d’un prix exorbitant, du moins pour l’étudiant que j’étais à l’époque, il était illusoire de débourser 100 E pour un servo, la solution est emprunté de nos amis pratiquant la VGM qui couplent plusieurs servos pour une seule gouverne, c’est pourquoi j’ai décider d’en faire autan avec 3 servos standard, mais pas n’importe quel standard, le S3003 de chez Futaba. Ok certains trouverons cela scandaleux mais j’assume, et les vols m’ont donné raison… .D’ailleurs la profondeur a subit le même traitement avec deux S3003 pour chaque demi stab, et pour les ailerons devinez quels servos j’ai utilisé… Soit, pour mon exemplaire 14 servos (si l’on rajoute le crochet de remorquage). Le second Toons utilise 2 royal BB pour la dérive, 8 Hitec 645 (9 Kg de couple) : 6 pour les ailerons ainsi qu’un par demi stab. Utiliser de tel servos est intéressant pour pouvoir utiliser des débattements vraiment très importants ou exécuter des figures en verticale descendante... .

IMG_0102Une platine de puissance est utilisée afin d’éviter au récepteur de débiter le courant nécessaire pour le fonctionnement d’un si grand nombre de servos. Deux batteries de 2.4 Ampères alimentent le  tout en débitant simultanément (avec une protection dans le cas où une d’entre elle donnerait des signes de faiblesses.)

  

Programmation

 

IMG_0105Lors de la construction je disposais d’une Mc 16/20 de Graupner, avec une telle radio la programmation doit être possible mais je crains une prolifération de cordons Y. Une Mpx 3010 a été utilisé pour les premiers vols. Cette radio est pour moi proche du top en programmation et je n’ai aucun cordon Y sur mon planeur et même les demis stab reste totalement indépendants. Mais il restait encore un problème, celui du nombre de voies disponibles. En effet, si l’on additionne le tout, on trouve 6 ailerons, 2 demi stab et une dérive soit 9 voies, c’est à dire le maximum autorisé par mon émetteur. Fini les rêves de remorquage et de train escamotable… Bref si vous voulez faire du remorquage vérifié le nombre de voies de votre émetteur !

A vrai dire il existe une alternative il suffit de coupler les deux volets internes avec le crochet mais cela reste du bricolage… malheureusement je pilote 4 axes (non indispensable) et je ne suis pas arrivé a programmer convenablement tout cela... Depuis peu j’utilise une Royal evo 12, qui comme son nom l’indique possède 12 voies et il n’y a donc plus de problèmes.

Finition

Un entoilage au vinyle a été choisi sur le Toons, mais avant cela il a été nécessaire d’effectuer une bonne séance de ponçage. Devant la quantité de dcm² à travailler, une ponceuse a été réquisitionné, et seul l’extrême finition a été réalisé manuellement. Le fuselage, la verrière et la dérive sont peints dès leur stratification dans le moule avec de la peinture automobile.

Le vol (Enfin !)

IMG_0020C’est après tout ces mois de construction que l’on c’est retrouvé au bord de la pente. Le premier exemplaire opérationnel fut celui de Benjamin Clamaron.

Quelques vols afin de tester la portance et le grand moment arriva. Je pense que nous étions assez confiant sur l’issue de ce vol, seul la portance irrégulière était a déplorer.

 Vérifications des débattements et puis Zou ! Après quelques pas d’élan je sentais le planeur voler de lui-même. Durant ce premier vol un problème de commande apparut (problème aussitôt résolut). Hormis cet incident rien d’autre ne fut à déplorer. Depuis de nombreux vols furent réalisés et seule les phases de vols les plus intéressantes vont être détaillées:

Le décollage : Peu de chose a signaler, le planeur est vraiment agréable aux basses vitesses, avec un peu de vent il doit être possible d’envoyer seul le planeur, mais comme jusqu'à présent un lanceur était disponible …  .La catapulte ? Pourquoi pas, mais nous n’avons jamais essayé. Tous les décollages ont été réalisé avec brio, merci les gars !

L’atterrissage : C’est le seul point négatif de ce planeur et les Aéfs tardent a ralentir la chose. Quand il y a de la place ça passe mais quand il s’agit de voler sur des pentes  « un peu » étroite c’est un moment assez « sport ». Mais l’habitude fait le reste.

Vol thermique : Là c’est pas mon Dada, la spirale c’est pour  Benj’. Il vous démontrera qu’il est possible de spiraler très serré, malgré le fait que le dièdre soit presque inexistant. A titre indicatif la vitesse de vol est très faible, des vols en parallèle avec des ailes volantes ont été tenté avec succès. C’est sur ce point que le Toons nous a le plus impressionné, il gratte vraiment très bien, alors que les deux premiers exemplaires sont d’un poids non négligeable. Le vol réalisé a Séderon, lors du national de F3F avec un vent donné par l’anémomètre du concours de moins de 4 m/Sec en est la meilleur preuve.

Vol rapide : Le Toons a été construit comme un planeur de 3D, c'est-à-dire nécessitant guère de grosse prise de badin pour voltiger. De toute manière nous avons observé une saturation de la vitesse (appréciable, car avec de telles gouvernes bonjour le flutter…).Cette saturation est quand même relative et il faut toujours rester prudent avec de tel engin.

Voltige classique : Rien a dire et heureusement !! Car si vous paniquez pour réaliser un tonneau avec un planeur destiné au 3D, je vous souhaite bonne chance pour le reste. Bref  le looping est archi classique. Le tonneau ne nécessite quasiment aucune correction, pour les 4 et 8 facettes je conseille de ne compenser que lors du passage en vol dos pour le reste c’est du sur pilotage. Le vol dos nécessite une pression a poussé faible, et le vol dos prolongé ne pose aucun soucis. Le renversement lui n’est pas commun, il devra ne pas être trop anticipé, car la « chose » mobile derrière le planeur se révèle très efficace… . La vrille et toutes ses combinaisons reste assez facile, la rotation est lente et le taux de chute assez faible. Les déclenchés font merveilles mais gare à votre palpitant car ça déménage quand même. Avec des combinaisons de toutes ces figures, ont obtient les mêmes qualités de vols qu’un swift ou un fox digne de ce nom (au restitutions près !). Mais attaquons nous aux configurations de vols où votre Fox ne pourra vous suivre :

Vol 3D 

IMG_0110Depuis quelques temps on entend parler de vols 3D. Mais qu’est ce que le vol 3D ? A vrai dire je n’en ai aucune idée, j’ai beau demandé à de nombreuses personnes compétentes dans ce domaine, et aucune ne m’a donné la même définition. En faisant une synthèse, on  obtient une définition qui pourrait être: « technique de vol permettant la réalisation de figure de voltige dans un volume le plus faible possible : soit de manière décroché soit en occultant le coté « trajectoire » de la voltige académique, le tout, généralement à de faible altitude. ».

 Alors analysons le Toons dans le domaine de vol:

Les tonneaux (et toutes ses variantes) attaqués aux basses vitesses passent grâce à l’inertie, il faut ce méfier de la vitesse atteinte lors de la fin de la figure qui est très faible, le top et de pousser légèrement (ce qui vous évite de décrocher) et de sortir un cran de volet, avec de l’habitude cela devient un automatisme.

Grâce à ses grandes gouvernes, le Toons réalise de splendide déclenché et même aux basses vitesses, mon plaisir est le demi déclenché négatif départ dos (Merci aux bretons d’avoir démocratisé cette manœuvre !), mais pour l’instant je n’ose pas réaliser cela à des altitudes souterraines…

IMG_0053Le vol tranche est moins facile qu’il n’y parait, le but étant de créer un peu de portance afin de pouvoir prolonger le plus longtemps possible cette position. Ce que je sais c’est qu’avec ce planeur il ne faut en aucun cas mettre de la dérive au début de la manœuvre (Le Toons ce braque verticalement, c’est quand même sympas mais bonjour la taille du décrochage…). C’est une des rares figures qui nécessite une prise de badin, car il faut de l’inertie. Pour l’instant nous balbutions terriblement sur cette figure… .Une variante est le vol en glissade, c’est super facile et diaboliquement esthétique, après une très légère prise de badin il suffit d’incliner le planeur à 45° et de mettre la dérive progressivement à contre en buté .La glissade est vraiment magique car possible sur des distances affolantes (apparemment la traînée induite doit s’annuler avec une portance créée par le fuselage, mais cela reste une supposition. Par contre il est certain que pour cette figure les servos de dérive sont dans les choux…mais promis c’est le seul moment !)

Les renversements peuvent être agrémenté de descente en « tombé tranche » si l’on maintient l’action à contre sur la dérive lors de la descente.

Bref de nombreuses acrobaties sont possibles et nous n’avons pas tout découvert.

Avec deux ans de recul, il nous est possible de tirer une première conclusion sur notre projet. Certes cette aventure est couronné d’un magnifique succès qui comporte beaucoup de points positifs mais aussi quelques points négatifs, voyons cela :

Bilan ?

Les moins

IMG_0137Malgré que le Toons vole très bien, on estime pouvoir gagner beaucoup sur la masse totale. Une mauvaise connaissance de ce genre de planeur nous a fait rentrer dans le cercle vicieux du poids (plus c’est lourd, donc plus je renforce, c’est donc plus lourd…). Entre les 2 premiers exemplaires 800 Gr par aile ont été gagné. Sur le fuselage en faisant attention sur la résine on économise près de 500 Gr, sur les stabs même histoire, surtout quand on pense au plomb que cela économise dans le nez… . Au total, il s’agit d’un gain estimé de 4 Kg soit près d’un tiers de la masse globale. Reste à savoir si l’on serait réellement gagnant.

Le second point négatif est le manque (relatif) d’efficacité des Aérofreins, là aussi on y travail. Certains penserons que le gabarit de ce planeur est un handicap mais quand on aime, on n’y pense même pas.

Les plus

Devinez ! Si vous ne trouvez pas c’est que vous avez zappé les lignes sur les qualités de vols !!

Notre piège a répondu présent sur de très nombreux points et nous nous sommes bien amusé durant la construction. Le plus marquant est, au risque de me répéter, sa faculté a voltigé dans un petit volume sans avoir besoin d’une portance démoniaque.

Evolution

Comme précisé précédemment, nous espérons optimiser le planeur, masse, profil… deux autres modèles sont en construction du coté de Toulouse. J’ai pour ma part, une variante en projet pour la voltige en plaine (sur la même base de fuselage) mais chut !! Pour le reste peu de chose devrait être modifiée.

Conclusion

Que dire de plus ! Je voudrais juste signaler que l’on a réalisé ce projet sans ce triturer sur de trop nombreux plans, calculs, théories et autres angoisses mathématiciennes, nous avons juste odieusement récupéré ce qui fonctionne le mieux sur tout un tas de planeur, parlé avec de nombreuses personnes compétentes et le feeling a fais le reste.

Remerciements

En cas de questions vous pouvez me contacter: jerome.bobin@voila.fr   

Caractéristiques

 

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